Publié le 05/05/2025
Entretien avec Me Alexandre Maas, notaire à Toul, et membre de l’Association Française de Droit Rural (AFDR).
Dans quelle mesure les notaires contribuent-ils aux missions de la Safer ?
Si les Safer ont des missions d’intérêt général contribuant à dynamiser l’agriculture et la forêt, accompagner le développement local, participer à la protection de l’environnement, et assurer la transparence du marché foncier rural, les notaires sont, quant à eux, chargés d’une mission de service public que leur délègue l’Etat pour authentifier les actes qu’ils rédigent. Ils protègent les droits des parties en garantissant la légalité des échangent et des conventions figurant dans les actes établis, auxquels ils confèrent une « force exécutoire » valant décision de justice. L’objectif étant d’apporter de la sécurité dans les transactions. La relation entre les notaires et les Safer se greffe sur cette mission généraliste.
A ce titre, ils interviennent au quotidien sur la maîtrise foncière - et l’on n’oubliera pas que les Safer sont des… sociétés d’aménagement foncier -, essentiellement par le biais d’actes de mutation (ventes) en permettant aux agriculteurs, et plus généralement aux porteurs de projets en milieu rural, d’acquérir les terres, de les transmettre en propriété, ou encore d’établir des baux ruraux à long terme aux fins d’exploitation…
Plus concrètement, il s’agit pour les notaires de préparer les actes, d’analyser les titres de propriété, vérifier les états civils des clients, s’assurer que les parcelles sont exemptes d’hypothèques… toujours dans le but de sécuriser les transactions.
Dans quels cas les notaires font-ils appel à la Safer ?
Si, d’une manière générale, c’est plutôt la Safer qui s’adresse à un notaire, souvent dans le cadre de la rédaction d’un acte de vente, il arrive que l’officier public fasse appel à la Safer pour identifier des parties - des exploitants, par exemple - dans le cas d’actes complexes à réaliser.
Ce peut être également le cas en matière d’audit d’un bail rural (nombre de baux ruraux sont simplement verbaux, le marché étant conclu d’une poignée de main entre le bailleur et le fermier !) lorsqu’il est nécessaire d’identifier le statut du ou des exploitants en place dans le cadre d’un acte notarié relatif à la maîtrise foncière d’une parcelle donnée.
Cela permet au notaire de sécuriser la maîtrise et la jouissance du foncier, à plus forte raison dans des situations où la Safer n’est pas concernée ou n’a pas droit de regard (de préemption, notamment), comme en matière forestière.
Cependant, les notaires se tournent régulièrement vers la Safer pour solliciter son expertise en ce qui concerne la valeur du foncier agricole. En effet, les Safer sont en mesure de réaliser un audit de terres dont la cession est envisagée et de fournir ainsi au notaire un ‘avis de valeur’, de façon à ‘coller’ le plus précisément possible au potentiel économique des parcelles. A ce titre, les Safer jouent un rôle de modérateur en termes de hausse du marché, pour permettre aux agriculteurs d’obtenir le foncier à un prix abordable.
Certains notaires - et c’est le cas en région Grand Est - sont spécialisés en matière forestière. Quels sont les relations, justement, avec le Pôle forestier de la Safer Grand Est ?
Il est vrai que lorsque l’on évoque les Safer, on pense tout de suite aux agriculteurs, et moins à l’espace forestier. Or, le secteur de la forêt permet aussi à une Safer d’exercer pleinement l’un des aspects de ses missions consistant à ‘dynamiser l’agriculture et la forêt’ dans l’aménagement foncier. Il s’agit d’ailleurs d’un enjeu important en France, dont plus d’un tiers du territoire métropolitain est couvert par la forêt, mais dont la parcellisation importante rend complexe l’exploitation. Chaque fois qu’elle le peut – et notamment quand elle est contactée par les propriétaires ou leurs notaires, sachant qu’il n’existe pas de droit de préemption, et donc d’information préalable, au bénéfice de la Safer sur le foncier forestier - la Safer intervient pour regrouper les parcelles et faciliter les opérations, dans un rôle d’aménageur, en quelque sorte.
Pour le Grand Est, le Pôle forestier de la Safer et les notaires œuvrent en étroite collaboration. Lorsque la nécessité s’en fait sentir, la Safer n’hésite pas à solliciter les notaires spécialistes de la forêt sur les problématiques rencontrées au fil des dossiers, disposant ainsi de ‘l’ingénierie notariale’ et de l’interprétation juridique dont elle a besoin. En outre, il faut ajouter que des affinités professionnelles réciproques se sont créés au fil du temps et de la pratique entre le notariat du Grand Est et le Pôle forestier de la Safer Grand Est, et que cela simplifie d’autant les choses…
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